Le gouvernement publie une foire aux questions à destination des élus sur l'accueil des réfugiés ukrainiens
Par Franck Lemarc
« Un document opérationnel ». C’est ainsi que Joël Giraud, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, qualifie la FAQ publiée hier « en concertation avec les associations d’élus ». « Tous les acteurs des territoires » sont concernés par la question de l’accueil des réfugiés, précise le ministre : « Statut juridique, logement, scolarisation, santé, accès à un emploi, accompagnement social, les questions à traiter sont nombreuses. Les préfets sont chargés de coordonner l’action des différents acteurs compétents pour y répondre, en lien étroit avec les collectivités locales. »
Transport : pas « d’initiatives isolées »
La FAQ, disponible sur le site du ministère est organisée autour de huit thèmes : informations, organisation de l’État, statut, transport des personnes déplacées, hébergement et logement, scolarisation, mobilisations citoyennes, actions de solidarité des collectivités.
Sur la question du transport, on retiendra que le ministère déconseille « fortement » aux collectivités de « prendre des initiatives isolées ». Il n’est donc pas indiqué pour une commune, un département ou une région d’envoyer un car en Pologne, par exemple, pour rapatrier des réfugiés, comme cela s’est fait. Les collectivités « qui souhaitent contribuer au transport de personnes déplacées sont invitées à prendre contact avec leur préfet de département ». À noter que cette position très ferme de l'État vient à contre-courant des initiatives de nombreux élus et des positions portées par le président de l'AMF, David Lisnard.
Logement
Le chapitre consacré au logement est nettement plus étoffé. Il est d’abord rappelé que les communes et EPCI peuvent recenser leurs hébergements disponibles sur un site spécifique dédié aux personnes morales. La répartition des réfugiés sur le territoire sera organisée « par le réseau des préfectures », et le travail de coordination, localement, là encore par les préfets. Pour les hébergements chez des particuliers, « chaque préfecture désigne une association référente qui a pour mission de mettre en relation les accueillants volontaires et les personnes déplacées », et « une convention tripartite » sera signée à chaque fois entre l’hébergeur, l’hébergé et l’association référente. Il est demandé de « privilégier des quartiers dotés d’une bonne desserte en transports en commun ». Dans le cas contraire, « il faudra s’assurer que les dispositions sont prises, le cas échéant avec le soutien de la collectivité territoriale, pour assurer la mobilité ».
Le ministère précise que le parc social vacant et le parc privé peuvent être mobilisés, et qu’il faut privilégier « le recours à l’intermédiation locative, en location/sous-location » : une association agréée par l’État loue un logement et le sous-loue à la personne hébergée. Il est conseillé de « privilégier la mise à disposition de logements à titre gracieux » ou, si la location est effectuée à titre onéreux, « de ne pas dépasser le loyer plafond APL ».
Scolarisation
Le document confirme, comme le ministère de l’Éducation nationale l’avait annoncé à l’AMF la semaine dernière, que « les mairies sont le point de contact des familles en matière d’inscription scolaire ». Pas seulement dans le primaire, donc, mais également pour le secondaire. La FAQ est très affirmative sur ce point, alors que le ministère, hier, avait dit à l'AMF que ce dispositif de guichet unique dans les mairies était « souhaitable » mais non obligatoire.
Dans chaque académie, une « cellule Ukraine » est créée pour « coordonner l’action des services de l’Éducation nationale ». Les enfants seront accueillis, autant que possible, dans des « UPE2A » (unités pédagogiques pour élèves allophones (1) arrivants).
Point important pour les maires : la FAQ indique que l’inscription à la cantine et l’accueil périscolaire sont « de droit » pour tous les enfants inscrits à l’école. Ce point est toutefois à nuancer : d'une part, il faut préciser que l'inscription à cantine est certes « de droit », mais en fonction des places disponibles, comme l'a rappelé le Conseil d'État en mars 2021 (lire Maire info du 25 mars 2021). Et, surtout, que sur l'accueil périscolaire, l'affirmation du ministère semble nettement plus douteuse, puisqu'il n'existe pas de texte prévoyant un tel droit d'accès général à ce jour.
Lors de la réunion qui a eu lieu hier entre l'AMF et le ministère de l'Éducation nationale, l'association a soulevé un certain nombre d'autres points d'attention qui ne figurent pas (ou pas encore) dans la FAQ : la nécessité de rassurer les maires sur la question des calculs d'effectifs scolaires, le besoin impératif de mettre en place des dispositifs d'interprétariat dans les écoles et le manque de disponibilité des UPE2A, la couverture de santé des enfants ukrainiens et le nécessaire suivi psychologique, ou encore les difficultés rencontrées pour inscrire des enfants en l'absence, parfois, de documents administratifs.
Soutien des collectivités
Le gouvernement rappelle le cadre juridique dans lequel s’effectue l’action extérieure des collectivités territoriales, en indiquant fermement, au passage, que « tout soutien à des actions à caractère militaire en Ukraine par des collectivités ou leurs groupements est strictement exclu » – le domaine militaire relevant exclusivement des compétences régaliennes de l’État. Les actions internationales des collectivités doivent également « respecter les principes de neutralité du service public, de séparation des Églises et de l’État, d’égalité, de liberté de réunion et de liberté d’exercice du culte ».
Il est également rappelé que les actions de soutien des collectivités doivent faire l’objet d’une délibération de l’assemblée délibérante (par exemple le conseil municipal ou communautaire). Signalons que l’AMF a conçu un modèle de délibération pour les conseils municipaux, qu'il ne reste qu'à compléter.
Concernant les aides directes, le gouvernement demande de privilégier les aides financières aux dons matériels, qui posent « d’importants problèmes logistiques ». Pour les soutiens financiers, il recommande de passer par le Faceco (Fonds d’action extérieure des collectivités territoriales), dont le fonctionnement a été détaillé dans Maire info le 4 mars.
(1) Autrement dit, les élèves ne parlant pas le français.
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